•                                    Un extrait de mon livre sur Gouraya

                                                         Devant l'école

    Devant chaque classe, une place. Et sur chaque place des arbres, des ficus, surtout devant la classe des grands. Ils étaient très touffus, avec des petites feuilles vert foncé et ils fournissaient des petites boules vertes qui tombaient par milliers sur le sol. Et notre plaisir, à nous, gamins, c’était de les écraser car cela faisait un petit bruit particulier. Je revois la petite boule : ce devait être une graine, creuse au centre et présentant un intérieur identique à une figue, mais en beaucoup plus petit et surtout, toutes rondes. Mais ce qui faisait que l’on s’en souvient d’autant plus, c’est que l’on  surnommait ces arbres : « arbres à chewing-gum». Tout simplement, parce qu’une simple blessure sur l’écorce et nos arbres pleuraient. Leur sève coulait comme de la résine mais cette sève était blanche, sans goût mais de texture caoutchouteuse – rien d’étonnant : le ficus et le figuier sont des  variétés de caoutchouc -  Nous, nous en faisions de la gomme à mâcher. Inutile de dire que les arbres avaient beaucoup de cicatrices. L’art était de faire son incision, à la fin de la classe, suffisamment haut pour que les petits ne viennent pas récolter le lendemain matin la sève tant convoitée. Et Jean-Claude, qui était un des plus grands, nous faisait trois incisions, une pour lui et une pour chacune de ses sœurs. Il fallait compter une nuit pour avoir de quoi « mâchouiller ». Libre à nous ensuite de parfumer ou sucrer ce morceau de chewing-gum. Moi, j’avais le don de le faire « virer » : l’amalgame se faisait mal, ma salive le transformait en une multitude de petites boules minuscules qui manquaient de cohésion. Et Arlette venait à mon secours en me le prenant, en me le remâchant et elle me le rendait ensuite ! On n’était pas dégoûté à l’époque ! Ces arbres avaient une autre particularité, c’est qu’ils étaient couverts de petits insectes qui adoraient se poser sur du jaune. Moi, je ne me souviens que d’une chose c’est qu’il ne fallait pas en avoir un dans l’œil, cela brûlait énormément…  Et la particularité des arbres de Gouraya, comme ceux de tous les villages d’Algérie, c’est qu’ils avaient leur tronc blanchi à la chaux. Dans le midi de la France on chaule aussi les troncs des arbres, surtout les fruitiers. Cette opération s ‘effectue en général tous les deux ans, l’hiver. Tout ceci afin de détruire les larves des parasites ou des champignons microscopiques qui se nichent sous l’écorce de l’arbre.                                                                                        

    Sur la place de droite, il y avait aussi des arbres mais moins nombreux. C’était à cet endroit que tous les ans, au 15 août, pendant trois jours, une piste de danse était installée et il y avait bal le soir. La place et les rues étaient pavoisées de lampions comme pour un 14 juillet en France, de guirlandes électriques de couleurs différentes le tout accompagné de musique et de flonflons toute la journée, et puis des marchands de friandises ambulants. C’était la «Fête» ! Nous apprenions à danser la samba avec notre mère. Il y avait beaucoup de monde qui venait des alentours et aussi des estivants. Mais en fait, à part les marchands arabes qui circulaient autour du kiosque, la fête était européenne. Les enfants indigènes venaient grappiller quelques friandises mais les adultes ne participaient pas à la liesse. Nous nous gavions de bliblis : c’était des pois chiches préalablement grillés puis enrobés de sucre coloré, rose, jaune ou blanc et puis des cacahuètes dans des cornets de journal,  des dattes et des pralines. C’était l’époque des sucres d’orge, bonbons en forme de bâtonnets fins d’une dizaine de centimètres, striés de couleurs différentes, et percés dans le sens de la longueur,  fabriqués à base de sucre et d’extrait d’orge et enveloppés dans un genre de papier cellophane avec une petite oreille à chaque bout. Les gâteaux arabes que nous adorions, n’étaient pas nombreux, ils n’étaient pas fabriqués de façon industrielle, et très peu artisanale. Mais quand on pouvait s’en faire offrir, c’était la joie : des makrouts ou makrodes, des zlabias ou zalabias, des cornes de gazelle, des becess, des loukoums etc… le miel nous dégoulinait dans les mains.


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  •                                    Un extrait de mon livre sur Gouraya

                                                         Devant l'école

    Devant chaque classe, une place. Et sur chaque place des arbres, des ficus, surtout devant la classe des grands. Ils étaient très touffus, avec des petites feuilles vert foncé et ils fournissaient des petites boules vertes qui tombaient par milliers sur le sol. Et notre plaisir, à nous, gamins, c’était de les écraser car cela faisait un petit bruit particulier. Je revois la petite boule : ce devait être une graine, creuse au centre et présentant un intérieur identique à une figue, mais en beaucoup plus petit et surtout, toutes rondes. Mais ce qui faisait que l’on s’en souvient d’autant plus, c’est que l’on  surnommait ces arbres : « arbres à chewing-gum». Tout simplement, parce qu’une simple blessure sur l’écorce et nos arbres pleuraient. Leur sève coulait comme de la résine mais cette sève était blanche, sans goût mais de texture caoutchouteuse – rien d’étonnant : le ficus et le figuier sont des  variétés de caoutchouc -  Nous, nous en faisions de la gomme à mâcher. Inutile de dire que les arbres avaient beaucoup de cicatrices. L’art était de faire son incision, à la fin de la classe, suffisamment haut pour que les petits ne viennent pas récolter le lendemain matin la sève tant convoitée. Et Jean-Claude, qui était un des plus grands, nous faisait trois incisions, une pour lui et une pour chacune de ses sœurs. Il fallait compter une nuit pour avoir de quoi « mâchouiller ». Libre à nous ensuite de parfumer ou sucrer ce morceau de chewing-gum. Moi, j’avais le don de le faire « virer » : l’amalgame se faisait mal, ma salive le transformait en une multitude de petites boules minuscules qui manquaient de cohésion. Et Arlette venait à mon secours en me le prenant, en me le remâchant et elle me le rendait ensuite ! On n’était pas dégoûté à l’époque ! Ces arbres avaient une autre particularité, c’est qu’ils étaient couverts de petits insectes qui adoraient se poser sur du jaune. Moi, je ne me souviens que d’une chose c’est qu’il ne fallait pas en avoir un dans l’œil, cela brûlait énormément…  Et la particularité des arbres de Gouraya, comme ceux de tous les villages d’Algérie, c’est qu’ils avaient leur tronc blanchi à la chaux. Dans le midi de la France on chaule aussi les troncs des arbres, surtout les fruitiers. Cette opération s ‘effectue en général tous les deux ans, l’hiver. Tout ceci afin de détruire les larves des parasites ou des champignons microscopiques qui se nichent sous l’écorce de l’arbre.                                                                                        

    Sur la place de droite, il y avait aussi des arbres mais moins nombreux. C’était à cet endroit que tous les ans, au 15 août, pendant trois jours, une piste de danse était installée et il y avait bal le soir. La place et les rues étaient pavoisées de lampions comme pour un 14 juillet en France, de guirlandes électriques de couleurs différentes le tout accompagné de musique et de flonflons toute la journée, et puis des marchands de friandises ambulants. C’était la «Fête» ! Nous apprenions à danser la samba avec notre mère. Il y avait beaucoup de monde qui venait des alentours et aussi des estivants. Mais en fait, à part les marchands arabes qui circulaient autour du kiosque, la fête était européenne. Les enfants indigènes venaient grappiller quelques friandises mais les adultes ne participaient pas à la liesse. Nous nous gavions de bliblis : c’était des pois chiches préalablement grillés puis enrobés de sucre coloré, rose, jaune ou blanc et puis des cacahuètes dans des cornets de journal,  des dattes et des pralines. C’était l’époque des sucres d’orge, bonbons en forme de bâtonnets fins d’une dizaine de centimètres, striés de couleurs différentes, et percés dans le sens de la longueur,  fabriqués à base de sucre et d’extrait d’orge et enveloppés dans un genre de papier cellophane avec une petite oreille à chaque bout. Les gâteaux arabes que nous adorions, n’étaient pas nombreux, ils n’étaient pas fabriqués de façon industrielle, et très peu artisanale. Mais quand on pouvait s’en faire offrir, c’était la joie : des makrouts ou makrodes, des zlabias ou zalabias, des cornes de gazelle, des becess, des loukoums etc… le miel nous dégoulinait dans les mains.


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  • Un passage de mes écrits sur l’Algérie

     

    Les petits Yaouleds


     …. et puis il y avait aussi les petits "Yaouleds".

     

    Les yaouleds, qui étaient-ils ?  En faisant mes recherches, j’ai découvert l’origine du mot « yaouled ». C’est un mot qui, en fait, est composé de deux autres mots» : « Ya » qui est une interjection mais qui peut aussi dire «viens » et le deuxième mot « ouled » qui veut dire « enfant ». Ainsi « ya ouled !» qui servait à héler un enfant est devenu « yaouled ». Les Européens avaient pour habitude d’appeler de cette manière les jeunes enfants qui leur servaient de commissionnaires, de « grooms ». Et ils étaient légions ces petits yaouleds aux alentours des gares, des ports tels qu’Alger, des restaurants, des marchés. Ils étaient partout. Toujours prêts à cirer les chaussures, à porter une valise ou les couffins pleins de victuailles des femmes. Ils flairaient les étrangers qui étaient pour eux des clients de choix. Ils tournaient autour d’eux, toujours en sautillant, riant, criant, paraissant heureux de leur sort. Leurs vêtements en loques  ne plaidaient pas toujours en leur faveur, mais leur bonne humeur, leurs plaisanteries, leurs drôleries effaçaient toute première impression négative.

    Ils étaient pourvus d’une grande patience, d’une grande persévérance et surtout d’une grande philosophie : il le fallait car ils se faisaient souvent rejeter. Ils avaient l’habitude de se contenter de peu. Mais moi cela me gênait. Je n’aimais pas les voir tourner autour de nous. J’avais une impression de mauvaise conscience. Ils étaient de notre âge. Nous, nous étions toujours « tirées à quatre épingles », quand nous étions enfants, et la pauvreté autour de moi me dérangeait. Ce n’était pas le « spectacle » de ces  enfants ou de ces gens en hardes qui me contrariait, c’était cette misère qui nous côtoyait contre laquelle nous ne pouvions rien. Ne rien pouvoir faire ! Maman donnait toujours une pièce. Elle nous avait appris à partager, mais pouvions-nous partager avec tous les malheureux ? Il était très courant de voir des indigènes mendier dans les rues, et toujours je quémandais une pièce pour la donner à ces gens. Notre mère nous en donnait une à chacune et nous allions, la conscience tranquille, déposer notre obole  dans la main du pauvre.
             Et à Alger, comme dans toutes les villes d’Algérie, il y avait des petits yaouleds. Je crois que ce mot s’est vulgarisé et que l’on appelait « yaouled » tous les  jeunes garçons arabes qui couraient dans les rues.

     


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  • Un passage de mes écrits sur l’Algérie

     

    Les petits Yaouleds


     …. et puis il y avait aussi les petits "Yaouleds".

     

    Les yaouleds, qui étaient-ils ?  En faisant mes recherches, j’ai découvert l’origine du mot « yaouled ». C’est un mot qui, en fait, est composé de deux autres mots» : « Ya » qui est une interjection mais qui peut aussi dire «viens » et le deuxième mot « ouled » qui veut dire « enfant ». Ainsi « ya ouled !» qui servait à héler un enfant est devenu « yaouled ». Les Européens avaient pour habitude d’appeler de cette manière les jeunes enfants qui leur servaient de commissionnaires, de « grooms ». Et ils étaient légions ces petits yaouleds aux alentours des gares, des ports tels qu’Alger, des restaurants, des marchés. Ils étaient partout. Toujours prêts à cirer les chaussures, à porter une valise ou les couffins pleins de victuailles des femmes. Ils flairaient les étrangers qui étaient pour eux des clients de choix. Ils tournaient autour d’eux, toujours en sautillant, riant, criant, paraissant heureux de leur sort. Leurs vêtements en loques  ne plaidaient pas toujours en leur faveur, mais leur bonne humeur, leurs plaisanteries, leurs drôleries effaçaient toute première impression négative.

    Ils étaient pourvus d’une grande patience, d’une grande persévérance et surtout d’une grande philosophie : il le fallait car ils se faisaient souvent rejeter. Ils avaient l’habitude de se contenter de peu. Mais moi cela me gênait. Je n’aimais pas les voir tourner autour de nous. J’avais une impression de mauvaise conscience. Ils étaient de notre âge. Nous, nous étions toujours « tirées à quatre épingles », quand nous étions enfants, et la pauvreté autour de moi me dérangeait. Ce n’était pas le « spectacle » de ces  enfants ou de ces gens en hardes qui me contrariait, c’était cette misère qui nous côtoyait contre laquelle nous ne pouvions rien. Ne rien pouvoir faire ! Maman donnait toujours une pièce. Elle nous avait appris à partager, mais pouvions-nous partager avec tous les malheureux ? Il était très courant de voir des indigènes mendier dans les rues, et toujours je quémandais une pièce pour la donner à ces gens. Notre mère nous en donnait une à chacune et nous allions, la conscience tranquille, déposer notre obole  dans la main du pauvre.
             Et à Alger, comme dans toutes les villes d’Algérie, il y avait des petits yaouleds. Je crois que ce mot s’est vulgarisé et que l’on appelait « yaouled » tous les  jeunes garçons arabes qui couraient dans les rues.

     


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  • Oudon



                                   La Loire à Champtoceaux


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  • Oudon



                                   La Loire à Champtoceaux


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  • Fifi la sauvageonne

     

    …Une année, où nous étions partis en vacances à Arthon et que Patricia était de garde à la maison, Fifi a réussi à sortir de son pigeonnier - le grenier très éclairé,  avec tout le confort, qui fait tout l’étage et qui était son refuge car elle était très sauvage  - et est allée se cacher dans le jardin, sous l’appentis, et en plus dans un endroit inaccessible : sous un petit pressoir. Elle devait être inquiète de ne plus nous voir et a préféré sortir. L’inconvénient, c’est qu’on ne pouvait plus la récupérer. Nous avons été obligés de rentrer plus tôt.

    Quelle patience il m’a fallu ! Et quand j’ai réussi à l’extirper de son coin, elle s’est blottie dans mes bras, heureuse de m’avoir retrouvée, puis tout d’un coup, elle a pris peur et m’a labouré le bras. Je ne l’ai pas lâchée, ses griffes toujours enfoncées dans ma chair. C’était horrible, mais je tenais bon. Elle s’est retrouvée en sécurité. Mais le lendemain mon bras était enflé, les balafres allaient de la main jusqu’au coude et en profondeur et j’avais de la fièvre. Quand le médecin - qui ne devait pas aimer les chats ! -  a vu les dégâts, il s’est mis en colère, m’a fait plusieurs piqûres disant qu’il n’était pas permis de se mettre dans cet état à cause d’un animal. J’avais un tendon atteint, le bras bandé du pouce jusqu’au coude, mais heureusement tout est revenu dans l'ordre. Des cicatrices en sont encore les témoins.

    Quand on aime, on va jusqu’au bout !


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  • Fifi la sauvageonne

     

    …Une année, où nous étions partis en vacances à Arthon et que Patricia était de garde à la maison, Fifi a réussi à sortir de son pigeonnier - le grenier très éclairé,  avec tout le confort, qui fait tout l’étage et qui était son refuge car elle était très sauvage  - et est allée se cacher dans le jardin, sous l’appentis, et en plus dans un endroit inaccessible : sous un petit pressoir. Elle devait être inquiète de ne plus nous voir et a préféré sortir. L’inconvénient, c’est qu’on ne pouvait plus la récupérer. Nous avons été obligés de rentrer plus tôt.

    Quelle patience il m’a fallu ! Et quand j’ai réussi à l’extirper de son coin, elle s’est blottie dans mes bras, heureuse de m’avoir retrouvée, puis tout d’un coup, elle a pris peur et m’a labouré le bras. Je ne l’ai pas lâchée, ses griffes toujours enfoncées dans ma chair. C’était horrible, mais je tenais bon. Elle s’est retrouvée en sécurité. Mais le lendemain mon bras était enflé, les balafres allaient de la main jusqu’au coude et en profondeur et j’avais de la fièvre. Quand le médecin - qui ne devait pas aimer les chats ! -  a vu les dégâts, il s’est mis en colère, m’a fait plusieurs piqûres disant qu’il n’était pas permis de se mettre dans cet état à cause d’un animal. J’avais un tendon atteint, le bras bandé du pouce jusqu’au coude, mais heureusement tout est revenu dans l'ordre. Des cicatrices en sont encore les témoins.

    Quand on aime, on va jusqu’au bout !


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  •  
    Le général Cambronne



    De son nom Pierre Jacques Etienne Cambronne,
    l'enfant illustre de Saint Sébastien sur Loire est en fait né à Nantes.

    Victor Hugo dans les Misérables, dira en ce qui concerne
    "le fameux Mot
     ":

    "Qui a vécu à Waterloo?...
    C'est un mot! Un mot qui fracture la poitrine, une insulte à la foudre! Le plus beau mot qu'un français ait répété!
    Dire ce mot et mourir ensuite,
    quoi de plus grand?
    c'est foudroyer le tonnerre!"


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    Le général Cambronne



    De son nom Pierre Jacques Etienne Cambronne,
    l'enfant illustre de Saint Sébastien sur Loire est en fait né à Nantes.

    Victor Hugo dans les Misérables, dira en ce qui concerne
    "le fameux Mot
     ":

    "Qui a vécu à Waterloo?...
    C'est un mot! Un mot qui fracture la poitrine, une insulte à la foudre! Le plus beau mot qu'un français ait répété!
    Dire ce mot et mourir ensuite,
    quoi de plus grand?
    c'est foudroyer le tonnerre!"


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