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      Théo n'est pas un félin bas de gamme comme le dit l'auteur de ce poème.

     

     

    On les a fait Venir!

    Je suis le chat de cimetière,
    De terrain vague et de gouttière,
    De Haute-Égypte et du ruisseau
    Je suis venu de saut en saut.

    Je suis le chat qui se prélasse
    A l'instant où le soleil passe,
    Dans vos jardins et dans vos cours
    Sans avoir patte de velours.

    Je suis le chat de l'infortune,
    Le trublion du clair de lune
    Qui vous réveille dans la nuit
    Au beau milieu de vos ennuis.

    Je suis le chat des maléfices
    Condamné par le Saint-Office;
    J'évoque la superstition
    Qui cause vos malédictions.

    Je suis le chat qui déambule
    Dans vos couloirs de vestibules,
    Et qui fait ses petits besoins
    Sous la porte cochère du coin.

    Je suis le félin bas de gamme,
    La bonne action des vieilles dames
    Qui me prodiguent le ronron
    Sans souci du qu'en dira-t-on.

    Épargnez moi par vos prières
    Le châtiment de la fourrière
    Où finissent vos émigrés
    Sans demeure et sans pedigree.

     

    Henri Monnier

    Écrivain et caricaturiste français

    1799 - 1877


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      Nature Morte de Claude Monet!

    Fruits de saison....

     

     

     

    Voici des fruits...

     

    Voici des fruits,des fleurs, des feuilles et des branches
    Et puis voici mon coeur qui ne bat que pour vous.
    Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches
    Et qu'à vos yeux si beaux l'humble présent soit doux.

     

    J'arrive tout couvert encore de rosée
    Que le vent du matin vient glacer à mon front.
    Souffrez que ma fatigue à vos pieds reposée
    Rêve des chers instants qui la délasseront.

     

    Sur votre jeune sein laissez rouler ma tête
    Toute sonore encor de vos derniers baisers ;
    Laissez-la s'apaiser de la bonne tempête.
    Et que je dorme un peu puisque vous reposez.

     

      Paul VERLAINE

     


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    La déshumanisation de l’Être


    Ils partagent avec nous cette vie sur la terre
    Depuis la nuit des Temps, ils se cachent et se terrent
    Ils sont devenus pour nous des produits et pourtant
    Lorsque l’on est seul, c’est vers eux que l’on temps
    Nos cœurs si déçus par l’âpreté humaine
    Et que l’on reçoit en retour la bonté sans la haine.

    Tous ces animaux magnifiques que l’on tue
    Alors qu’on le sait, lorsqu’ils ne seront plus,
    Quand sur terre ne resteront que les hommes
    Crées à l’image de Dieu, mais en somme
    Diabolisés par leur désir de destruction inné,
    Ils n’en finiront plus de vouloir s’entre-tuer !

    La planète était belle et harmonieuse
    Tant que la vie n’apporte cette nombreuse
    Humanité barbare et, hélas, tueuse !


    Brigitte BARDOT


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    Confidences automnales

    L'automne jeune et beau dans les plaines arides,
    Vibrait ingénument de ses feux redoublés ;
    Tes longs cheveux blanchis, en flots amoncelés,
    Mangeaient ton clair visage aux lumineuses rides.

    Et je te voyais là, doux fantôme incertain
    Contemplant sur mon front une ou deux mèches grises,
    Et je sentais sur moi tes prunelles éprises
    Qui semblaient repousser quelque démon lointain.

    Vingt ans avaient coulé, perfides comme une onde,
    Vingt ans de vain tumulte et de lits captieux
    Où le temps avait mis de l'eau trouble en tes yeux
    Et dans les miens l'amère inanité du monde.

    J'étais le confident, le complice autrefois
    Bien que dix mille jours fissent de toi l'aînée ;
    Nous avions souvent eu la lèvre illuminée
    Par des tableaux profonds et rieurs à la fois.

    Cependant le vent tiède échevelait nos têtes ;
    Tes fines mains déjà frissonnaient en fuyant ;
    Dehors tout s'animait ; le soleil bienveillant 
    Faisait avec éclat de nouvelles conquêtes.

    Et sans même un regard et le coeur affamé,
    D'une tremblante voix d'où montait une plainte,
    Tu murmuras longtemps, vieille, la face éteinte :
    " Oui, je t'ai bien aimé, bien aimé, bien aimé... "



    Thierry Cabot

    Poème extrait de " La Blessure des Mots "

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      marions nous

    Marions-nous charmante Rose!

     

     

    Marions-nous charmante rose
    Marions-nous car il est temps
    Belle rose charmante rose
    Marions-nous car il est temps
    Belle rose du printemps .

    Auteur Anonyme.

    toto01160-rose-copie-2.jpg


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      front-de-mer-gouraya-algerie-1119601697-1322095

      Le front de mer à Gouraya

    le ponton qui servait de plongeoir

     

    Jules Verne

    La mer est tout

                                               "- Vous aimez la mer, capitaine?.
    - Oui ! je l'aime ! La mer est tout ! Elle couvre les sept dixièmes du globe terrestre. Son souffle est pur et sain. C'est l'immense désert où l'homme n'est jamais seul, car il sent frémir la vie à ses côtés. La mer n'est que le véhicule d'une surnaturelle et prodigieuse existence; elle n'est que mouvement et amour; c'est l'infini vivant, comme l'a dit un de vos poètes. La mer est le vaste réservoir de la nature. C'est par la mer que le globe a pour ainsi dire commencé, et qui sait s'il ne finira pas par elle ! Là est la suprême tranquillité. La mer n'appartient pas aux despotes. À sa surface, ils peuvent encore exercer des droits iniques, s'y battre, s'y dévorer, y transporter toutes les horreurs terrestres. Mais à trente pieds au-dessous de son niveau, leur pouvoir cesse, leur influence s'éteint, leur puissance disparaît ! Ah monsieur, vivez, vivez au sein des mers ! Là seulement est l'indépendance! Là je ne reconnais pas de maîtres ! Là je suis libre !"

    Jules vernes  Vingt mille lieus sous les mers"

     

    D'après Jules Verne, 20000 Lieues sous les mers


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      Photo trouvée sur le net

     

    IL PLEUT de (Francis Carco)
     
     
    Il pleut — c’est merveilleux. Je t’aime.
    Nous resterons à la maison :
    Rien ne nous plaît plus que nous-mêmes
    Par ce temps d’arrière-saison.

    Il pleut. Les taxis vont et viennent.
    On voit rouler les autobus
    Et les remorqueurs sur la Seine
    Font un bruit... qu’on ne s’entend plus !

    C’est merveilleux : il pleut. J’écoute
    La pluie dont le crépitement
    Heurte la vitre goutte à goutte...
    Et tu me souris tendrement.

    Je t’aime. Oh ! ce bruit d’eau qui pleure,
    Qui sanglote comme un adieu.
    Tu vas me quitter tout à l’heure :
    On dirait qu’il pleut dans tes yeux.


    Francis CARCO (1886-1958)

     


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    Paul Signac Femmes au puits 1892

     Femmes au puits de Paul Signac 1892

     

    Le puits

     

    Le puits profond était poli comme un miroir ;
    Le ciel s'y reflétait tout bleu, pur de nuages,
    Formant d'azur et or un nimbe aux frais visages
    Des amoureux penchés et ravis de s'y voir.

    Sur le riant cristal encadré d'un mur noir
    Se jouaient leurs yeux vifs en mille badinages ;
    Lancés du bout des doigts, entre ces deux images
    Les baisers voltigeaient dans le sombre couloir.

    Voici qu'aux doux signaux et qu'à l'oeillade folle
    La source en bouillonnant vient couper la parole :
    Du flot qui les traduit le sourire est moins clair...

    Mais pour mieux se parler dans ces brèves tempêtes,
    Mélant leurs cheveux blonds, ils rapprochaient leurs têtes,
    Et les baisers cessaient de se perdre dans l'air.

    Victor de Laprade
    (1812-1883)

     


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  • bateaux-hollandais-dans-la-tempete-Turner-1801.jpg  Turner 1801, bateaux hollandais dans la tempête

     

    Homme et la Mer

     

    Homme libre toujours tu chériras la mer!

    La mer est ton miroir; tu contemples ton âme

    Dans le déroulement infini de sa lame,

    Et ton esprit n´est pas un gouffre moins amer.

     

    Tu te plais à plonger au sein de ton image;

    Tu l´embrasses des yeux et des bras, et ton cœur

    Se distrait quelquefois de sa propre rumeur

    Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

     

    Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets:

    Homme, nul n´a sondé le fond de tes abîmes,

    O mer, nul ne connaît tes richesses intimes,

    Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets!

     

    Et cependant voilà des siècles innombrables

    Que vous vous combattez sans pitié ni remords,

    Tellement vous aimez le carnage et la mort,

    O lutteurs éternels, ô frères implacables!

      

     

    Charles Baudelaire 

     

     

     


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     François Cavanna

     Ma langue française

    Suis-je un intellectuel ? Je ne sais pas. Je ne sais pas trop ce que c'est. Je ne suis pas allé «dans les écoles», je suis tout juste allé à l'école. J'étais un gosse de la rue, et parmi les plus pauvres d'entre les pauvres. J'étais un enfant d'immigré. Je suis né et j'ai grandi dans le milieu fermé des travailleurs italiens du bâtiment de la banlieue de Paris. J'étais destiné à devenir maçon, comme papa, ou employé des postes, ce qui aurait fait tellement plaisir à maman. J'aurais été l'un ou l'autre sans regret, j'aurais, je le sais, fait joyeusement mon boulot, j'aurais été un maçon habile et consciencieux ou un postier qui aurait grimpé les échelons. J'ai d'ailleurs été l'un et l'autre, successivement.
    Si je ne m'y suis pas tenu, c'est que mes réactions devant les hasards de la vie, en une époque tout spécialement épouvantable, m'ont projeté hors de l'orbite assignée. Et voilà que j'ai fait métier de dessiner, et puis d'écrire, et que j'ai pu aider, pendant la plus fructueuse partie de ma vie, de plus jeunes que moi à dessiner et à écrire. On m'a appris à lire très tôt, dès ma quatrième année, je pense. En tout cas, à six ans, je lisais et écrivais à peu près couramment, comme d'ailleurs les autres enfants de pauvres que leurs mères accablées de travail confiaient chaque matin à l'école maternelle.
    La lecture est devenue très vite pour moi un enchantement, puis une passion, un besoin, une intoxication. Je t'ai découvert dans les pages des livres où tu te cachais, ô mon beau parler français, et ce fut le coup de foudre.
    Au vrai, je t'ai découvert en deux fois: d'abord le parler de la vie, et puis le parler des livres.
    Je parlais comme parle un enfant: par imitation. Le français était ma langue maternelle et exclusive. Maman, fière paysanne des forêts de la Nièvre, n'autorisait que le français à la maison. C'était aussi la langue de la rue où nous traînions entre galopins, car tous les petits Ritals, passé la porte de chez eux, ne connaissaient que le français, ou plutôt l'argot des faubourgs. L'italien était pour moi une langue secrète et prestigieuse que parlait mon père avec ses camarades et que je ne comprenais pas.
    A la maternelle, on nous lisait « Le Petit Poucet ». On nous faisait chanter des chansons. Ces mots qui n'étaient pas les mots de tous les jours, de la maison, de la rue, et quand même des mots simples que je connaissais, mais arrangés de façon jolie, ces mots me ravissaient, m'émouvaient, m'emportaient ailleurs, là où le ciel est bleu comme sur les images.
    Je me suis abandonné à la magie des mots, au balancement rythmé de la phrase. Je trouvais dans les mots plus que le sens des mots. J'entendais la musique des mots, je voyais le dessin des mots, et la couleur des mots, autant que les êtres et les objets qu'ils évoquaient, autant que l'histoire qu'ils racontaient.
    J'étais un enfant intelligent, exagérément sensible peut-être. Je ne comprenais pas tout, mais je pressentais. Ce qui lui demeurait énigme, ma mémoire le mettait de côté, ça finirait bien par s'éclaircir. Ça finissait bien, en effet.
    Plus tard, ô ma langue bien-aimée, j'ai dû apprendre tes lois et tes rituels et, si je n'ai pas toujours été un bon élève, car j'étais fort turbulent, je les ai du moins reçus comme les règles d'un jeu fascinant, je n'y voyais ni contrainte ni arbitraire, mais logique et cohérence. On m'enseignait en même temps les rudiments de l'arithmétique, de la géométrie et des sciences dites « physiques », et j'y trouvais la même harmonie, la même rigueur procédant de la même logique, car il n'y a qu'une logique. Ce monde était un monde solide et beau. Tu y resplendissais et l'éclairais, car c'est par toi qu'on me l'expliquait.

     

     

    (extrait de Mignonne, allons voir si la rose... éditions Belfond)


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