• DSC04911 bis

    La feuille

    De ta tige détachée,
    Pauvre feuille desséchée,
    Où vas-tu ? - Je n'en sais rien.
    L'orage a brisé le chêne
    Qui seul était mon soutien.
    De son inconstante haleine
    Le zéphyr ou l'aquilon
    Depuis ce jour me promène
    De la forêt à la plaine,
    De la montagne au vallon.
    Je vais ou le vent me mène,
    Sans me plaindre ou m'effrayer :
    Je vais où va toute chose,
    Où va la feuille de rose
    Et la feuille de laurier.

    Antoine Vincent Arnault
      (1766-1834)

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  • DSC01503 bis

    Un jour d'hiver

    Arqué haut sur les monts et d'un bleu sans nuages
    Qu'un triomphant soleil embrase éblouissant,
    Le ciel, par la vallée où la chaleur descend,
    Anime, en plein hiver, la mort des paysages.

    Il semble qu'ici, là, la mouche revoltige,
    Tourne dans la poussière ardente du rayon ;
    On va voir le martin-pêcheur, le papillon,
    L'un raser le ruisseau, l'autre effleurer la tige !

    Le ravin clair bénit l'horizon rallumé ;
    Du branchage et du tronc l'arbre désembrumé
    Contemple, radieux, le luisant de la pierre.

    Et, dans l'espace, au loin, partout, les yeux surpris
    Ont la sensation d'un été chauve et gris
    Dont la stérilité rirait à la lumière.

                       Maurice Rollinat (1846-1903)


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  • flocon petit-7ced3
    Jules Verne (1828-1905)

    Quand par le dur hiver...

    Sonnet

    Quand par le dur hiver tristement ramenée
    La neige aux longs flocons tombe, et blanchit le toit,
    Laissez geindre du temps la face enchifrenée.
    Par nos nombreux fagots, rendez-moi l'âtre étroit !

    Par le rêveur oisif, la douce après-dinée !
    Les pieds sur les chenets, il songe, il rêve, il croit
    Au bonheur ! - il ne veut devant sa cheminée
    Qu'un voltaire bien doux, pouvant railler le froid !

    Il tisonne son feu du bout de sa pincette ;
    La flamme s'élargit, comme une étoile jette
    L'étincelle que l'oeil dans l'ombre fixe et suit ;

    Il lui semble alors voir les astres du soir poindre ;
    L'illusion redouble ; heureux ! il pense joindre
    A la chaleur du jour le charme de la nuit !

    Jules Verne.


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  • lune blanche

    LA LUNE BLANCHE

    La lune blanche

    Luit dans les bois;

    De chaque branche

    Part une voix

    Sous la ramée...

     

    O bien aimée.

     

    L'étang reflète

    Profond miroir,

    La silhouette

    Du saule noir

    Où le vent pleure...

     

    Rêvons, c'est l'heure.

     

    Un vaste et tendre

    Apaisement

    Semble descendre

    Du firmament

    Que l'astre irise...

     

    C'est l'heure exquise.

     

     

    Paul Verlaine

     

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  • 00002063chandelais
    J'ai trouve cette photo sur Internet!
    Merci au photographe Emmanuel Sechet et au poête Dominique Simonet

    Forêt de Chandelais

    Ton ombrage est un temple ou les piliers de chênes
    Montent majestueux dans l'infini du ciel,
    Refuge foisonnant et providentiel,
    D'un monde naturel, heureux, libre sans chaînes.

    Arbres, grands chevaliers, en croisade, éclatants,
    Vous avez combattu, vaillants sous votre armure,
    Et revêtant toujours votre verte parure,
    Vous renaissez encore au soleil du printemps.

    Beaucoup ont vu passer, courant vers la rivière,
    Des cavaliers lancés tout droit, sans un regard,
    Suivant un Duc, un Roi, Les Lys en étendard,
    Une Reine étendue en sa fine litière.

    Le théâtre éternel a planté son décor,
    Chandelais étalée, en tes hautes ramures,
    Et circulent sans fin souvenirs et murmures
    Quand on écoute au loin vibrer le son du cor.

    Aux longs chemins tracés par une belle étoile,
    Le destin et la vie ont su guider mes pas,
    De ta douce lumière, à mon coeur, tu frappas,
    A ton plus haut sommet, le vent porte ma voile!

    Dominique Simonet


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  • Harmonie du soir

     

    Voici venir les temps où vibrant sur sa tige

    Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;

    Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir ;

    Valse mélancolique et langoureux vertige !


    Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;

    Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige ;

    Valse mélancolique et langoureux vertige !

    Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.


    Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige,

    Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir !

    Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;

    Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.


    Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,

    Du passé lumineux recueille tout vestige !

    Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige...

    Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir !


    Charles Baudelaire

    Extrait du recueil "LES FLEURS DU MAL", paru en 1857.

     


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  • Forêt arthonnaise

    CHATEAUBRIAND

                                       

                                       

    LA FORÊT

                                       

                                       

                                        Forêt silencieuse, aimable solitude,

                                        Que j'aime à parcourir votre ombrage ignoré

                                        Dans vos sombres détours, en rêvant égaré,

                                        J'éprouve un sentiment libre d'inquiétude,

                                        Prestige de mon cœur! Je crois voir s'exhaler

                                        Des arbres, des gazons, une douce tristesse:

                                        Cette onde que j'entends murmure avec mollesse,

                                        Et dans le fond des bois semble encor m'appeler.

                                        Oh! Que ne puis-je, heureux, passer ma vie entière

                                        Ici, loin des humains! Au bruit de ces ruisseaux,

                                        Sur un tapis de fleurs, sur l'herbe printanière,

                                        Qu'ignoré je sommeille à l'ombre des ormeaux!

                                        Tout parle, tout me plaît sous ces voûtes tranquilles:

                                        Ces genêts, ornements d'un sauvage réduit,

                                        Ce chèvrefeuille atteint d'un vent léger qui fuit,

                                        Balancent tour à tour leurs guirlandes mobiles.

                                        Forêts dans vos abris gardez mes vœux offerts,

                                        A quel amant jamais serez-vous aussi chères?

                                        D'autres vous rediront des amours étrangères;

                                        Moi, de vos charmes seuls j'entretiens vos déserts.


                                       
      Chateaubriand


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  • Espérance

    Pour vous les opprimés,
    Il nous faut proclamer
    Partout égalité,
    Crier tous liberté.
    Car personne n'a le droit
    De dicter force et loi,
    De rejeter la foi,
    Le monde est dur et si cruel parfois!

    Pour vous les affamés,
    Nous devons réclamer,
    Donner et partager,
    Les peuples sont en danger.
    Pour vous les mendiants,
    Les gueux, les errants,
    De la famine mourrant,
    La terre devrait nourrir tous ses enfants!

    Pour vous, les condamnés,
    Noires âmes damnées,
    Les fleurs de vos années,
    Par le temps vite fanées.
    Vous, tous les incompris,
    Et tous les malappris,
    Les voleurs, les bandits,
    Trouverez-vous un jour un paradis?

    Pour vous mécréants,
    Les athées, les croyants,
    Les fous intolérants,
    Les bons et les méchants,
    Les sectaires, les gentils,
    Au jugement ne sont maudits.
    Chaque vie d'homme a un prix,
    Pour l'éternel salut de tous, je prie!

    Pour vous les mal-aimés,
    Les coeurs si désarmés,
    Dans une vie sans pitié,
    Sans amour, amitié,
    Oubliez vos souffrances,
    Vivez dans l'insouciance,
    Reprenez la confiance,
    Trouvez enfin la joie et l'espérance!


    Dominique Simonet


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  • Eclat de rose......à Maryse

    Tu as vécu Maryse comme vivent les roses,
    En éclat du printemps, en fraîcheur du matin.
    La mort t'a emportée, Ô cruel destin,
    Au jardin éternel que les larmes arrosent.

    Tu t'es battue longtemps, si belle fleur éclose,
    En pétales de velours et robe de satin,
    Pour goûter de la vie les douceurs du festin.
    Du terrible combat à présent tu reposes.

    Ton âme s'est enfuie, ton corps reste bien seul,
    Dans la nuit noire et froide, couchée dans ton linceul.
    Les fleurs et les étoiles sont filles de l'Univers,

    Elles naîssent,vivent et meurent, cycle d'infinité.
    Au rythme des saisons revient toujours l'été,
    La rose refleurira après un long hiver!

    Dominique Simonet


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    • José-Maria de HEREDIA   (1842-1905)

     

    Brise marine

    L'hiver a défleuri la lande et le courtil.
    Tout est mort. Sur la roche uniformément grise
    Où la lame sans fin de l'Atlantique brise,
    Le pétale fané pend au dernier pistil.

    Et pourtant je ne sais quel arome subtil
    Exhalé de la mer jusqu'à moi par la brise,
    D'un effluve si tiède emplit mon coeur qu'il grise ;
    Ce souffle étrangement parfumé, d'où vient-il ?

    Ah ! Je le reconnais. C'est de trois mille lieues
    Qu'il vient, de l'Ouest, là-bas où les Antilles bleues
    Se pâment sous l'ardeur de l'astre occidental ;

    Et j'ai, de ce récif battu du flot kymrique,
    Respiré dans le vent qu'embauma l'air natal
    La fleur jadis éclose au jardin d'Amérique
    .


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